« À 35 ans, les instituteurs ont encore 41 ans à vivre, les manœuvres 34 ans seulement » (Guy Desplanques - 1973 - Économie et statistique)

Par Nicolas Oberhauser

Si des données systématiques concernant les différences de mortalité entre groupes occupationnels sont disponibles de manière continue en Grande-Bretagne depuis le début du XXe siècle, ce n'est pas le cas en France. Les recherches françaises sur ce même thème ont été beaucoup plus sporadiques – et virtuellement inexistantes des années 1920 aux années 1950. Les enquêtes sur la mortalité différentielle débutent à l’INSEE en 1954. Elles s’appuient sur un échantillon de données tirées du recensement général de 1954, confrontées périodiquement aux bulletins de décès du Répertoire national d’identification des personnes physiques. Ce texte de Guy Desplanques, lui aussi démographe à l’INSEE, vient reprendre et prolonger pour la période 1960-1965 les conclusions de ces enquêtes antérieures. Il n'apporte pas d'élément radicalement nouveau à cet égard. Mais comme en témoigne son titre, il présente les résultats obtenus sur un mode différent – mettant l'accent sur leur importance sociale et donnant prise à leur ressaisie politique. Et effectivement, le texte de Desplanques va susciter des réactions que n’avaient pas provoquées les publications précédentes de l’INSEE sur la mortalité différentielle. Il va circuler parmi les sociologues et démographes. Mais il va aussi et surtout se trouver progressivement relayé dans la sphère médiatique et politique. On en trouve ainsi des échos dans le journal Le Monde, mais aussi au sein du rapport publié en 1977 par la Commission nationale Santé du comité central du Parti communiste français, sous le titre Prendre soin de la santé. Cet article va ainsi contribuer à la mise en visibilité des inégalités sociales de santé durant les années 1970 en France – une visibilité éphémère, cette problématique perdant de son actualité dès le début des 1980.

L'article de Desplanques est disponible ici en libre accès.