« Il ressort de l’enquête que les femmes en Suisse se sentent, subjectivement, plus sujettes à la maladie que les hommes » (Rapport « Femmes et santé » - 1985)
Par Sandrine Maulini
Dans les années 1980 en Suisse, la problématique des inégalités sociales de santé se fraie un chemin dans les agendas à la fois scientifiques et politiques, avec dans un premier temps une attention particulière accordée au facteur du genre. Ainsi, le 14 octobre 1985, la Commission fédérale pour les questions féminines présente à la presse un rapport intitulé « Femmes et santé ». Réflexion subsidiaire aux débats publics entourant la dixième révision de l’assurance vieillesse et survivants (AVS) et l’éventuelle augmentation de l’âge de la retraite des femmes, la recherche mandatée par les pouvoirs publics exploite les données de l’étude dite SOMIPOPS (Système d’indicateurs socio-médicaux de la population suisse), généralement considérée comme la première enquête représentative sur la santé des Suisses.
Ce rapport rédigé par Elizabeth Zemp, Robert E. Leu, Felix Gutzwiller et Reto J. Doppmann fait état d’un différentiel significatif entre hommes et femmes – la population féminine jouissant d’une espérance de vie supérieure de plus de 6 ans, mais se plaignant toutefois de davantage de problèmes de santé. En revanche, il n’identifie pas les raisons de la morbidité plus élevée chez les femmes, se risquant tout au plus à avancer quelques hypothèses explicatives. En particulier, les données collectées par l’équipe de recherche ne permettent pas de déterminer si le cumul des tâches qu’assument traditionnellement les femmes impacte leur état de santé. Or la question est centrale dans le cadre des débats sur l’AVS, puisqu’elle réside au cœur de l’argumentaire des opposants à un relèvement de l’âge de la retraite des femmes, et ce jusqu’à nos jours.
Aux yeux de la Commission pour les questions féminines, les résultats obtenus se révèlent dès lors insuffisants pour servir de base décisionnelle en matière de politique sociale. De fait, le rapport sera très peu mobilisé par la suite et son impact ne s’étendra pas au-delà de quelques articles de presse.
Le rapport est disponible ici en libre accès.